Sandrine van den Oudenhoven, Directrice de job4U2
Considérer la relocalisation comme un projet binôme
Forte de son expérience en matière de relocalisation, Sandrine van den Oudenhoven,
française d’origine, mère de 2 filles et mariée à un hollandais, a décidée de miser sur son
passé et d’en faire bénéficier les conjoint(e)s d’expatrié(e)s dans la région. Par le biais de
sa société job4U2, créée en 2010, elle offre ses services pour parer au risque de sentiment
de déracinement et faciliter l’intégration (professionnelle et privée) dans la région.
Quelles sont prestations offertes par job4U2?
En deux mots, job4U2 apporte son aide au projet d’installation en Suisse pour les
conjoints et partenaires d’employés internationaux qui acceptent un poste dans la
région. Mon entreprise couvre le Mittelland; principalement les cantons de Berne,
de Neuchâtel, de Soleure et de Fribourg.
Quel est le profil des expats que nous accueillons dans la région?
La majorité des couples d’expats soutenus par job4U2 ont un profil professionnel
assez senior. Ils ont souvent un haut niveau d’éducation, disposent d’une bonne
expérience professionnelle et sont, dans l’ensemble de plus en plus polyglottes.
Est-ce toujours essentiellement la femme qui suit l’homme, ou les
temps changent-ils?
Et bien, en 2012, les 2/3 des conjoints qui ont eu recours aux services de Job4U2
étaient des hommes... Mais il faut bien dire que, selon les statistiques, ce sont
encore majoritairement les femmes qui suivent les hommes dans 80% des cas. 90%
de ces couples sont mariés et n’en sont souvent pas à leur première relocalisation.
S’ils ne bénéficient pas d’un support tel que celui offert par job4U2, 75% des
conjoint(e)s restent sans emploi durant leur séjour alors que 85% d’entre eux
souhaiteraient travailler.
Ces personnes peinent-elles à s’intégrer dans la région?
Oui malheureusement, si elles ne sont pas aidées, il est assez difficile pour elles
de s’intégrer dans la région et cela pour plusieurs raisons. Pour commencer, il
n’existe pas de réseaux d’expats dans la région contrairement à Genève, par
exemple où, il est beaucoup plus simple de retrouver des pairs. Il y a bien des
programmes d’intégration pour étrangers ici mais ceux-ci s’adressent avant tout
à des populations immigrées qui généralement n’ont pas les mêmes attentes ni
les mêmes besoins. En terme de volume, il n’y a pas assez d’expats dans la région
pour que les municipalités s’y intéressent. Ce qui entraine d’une certaine façon
un cercle vicieux, car le manque - disons – de «structures d’accueil» n’encourage
pas les expats à s’installer dans la région. De plus, bien souvent, à leur arrivée,
ces personnes ne parlent ni l’allemand, ni le français mais l’anglais même si ce
n’est pas toujours leur langue maternelle. Il y a donc une barrière linguistique
qui ne leur permet pas d’intégrer des réseaux locaux ou de participer à des
activités sportives ou autres. De plus, il ne faut pas oublier qu’avant leur arrivée
ces personnes travaillaient à 100% et se retrouvent ici au foyer. Tout cela fait
qu’elles ressentent rapidement un grand sentiment d’isolation, voire un vide
existentiel!
Comment ces personnes sont-elles encadrées par job4U2?
Le projet que nous proposons pour le conjoint est avant tout centré sur le do-
maine du professionnel. L’intégration se fait avant tout par le travail qui consti-
tue un élément important de leur identité personnelle. L’objectif premier est
donc de les assister dans la recherche d’un emploi ou dans la création de leur
propre entreprise. Lorsque cela est possible nous les assistons déjà avant leur
départ pour la Suisse afin de préparer au mieux leur arrivée dans la région.
Pourquoi les sociétés qui embauchent les expats devraient-elles investir
du temps et de l’argent pour les conjoints?
Déjà, si les conjoint(e)s et partenaires sont contre la relocation celle-ci ne se fera pas.
De plus, les conjoint(e)s et partenaires sont la cause principale des interruptions
d’engagements professionnels à l’étranger. Leur bien-être a un impact majeur sur le
bien-être de l’expat et par extension sur leur performance au travail. Il faut égale-
ment noter que les conjoint(e)s sont le moteur de l’intégration de la famille dans leur
nouvel environnement. Et puis, il ne faut pas oublier que bien souvent, ils ont à leur
charge tout le côté pratique de la relocation. L’employeur peut donc de ce fait
compter à 100% sur son nouveau collaborateur qui n’a pas à dégager du temps libre
pour s’occuper son nouveau logement et autres. En ce qui concerne l’investissement
en temps pour l’employeur, c’est justement tout l’intérêt de la proposition de service
de job4U2 : nous prenons en charge la gestion de la relocation. Ce qui est unique
et original est que nous l’abordons en collaboration avec le conjoint et non avec
l’employé.
Comment se lance-t-on dans une telle aventure?
Le déclic s’est fait chez moi, il y a plus de quinze ans en arrière avec ma première
entrée en fonction à Paris. Très rapidement, je me suis demandée comment il
allait être possible de continuer à ce rythme là, de viser l’international et d’avoir
une vie de famille! Mais ce n’est qu’en 2010, forte de mon propre vécu en termes
de relocalisations, de défis et difficultés de carrières-tandem à l’internationale et
fortes des échanges intenses que j’ai eu avec de nombreux conjoint(e)s d’expats
que mon projet d’entreprise s’est concrétisé et que je me suis décidée à oser une
réorientation professionnelle en fondant job4U2.
Pour faire connaître job4U2, j’ai débuté avec du marketing en ligne pour pré-
senter la société. A présent, ce sont les sociétés qui recrutent les expats qui nous
sollicitent pour assister leurs conjoints. Et puis, on nous trouve toujours sur
LinkedIn, Facebook et a ne pas oublier, sur notre site internet www.job4U2.ch et
le blog www. job4u2-switzerland.blogspot.com.
Et comment jongles-tu entre tes différents rôles d’entrepreneuse, de
maman et d’épouse?
(Rire joyeux) C’est l’horreur!
Non. En fait, il faut avant tout être extrêmement bien organisée. Et l’avantage
avec mon travail, c’est que je peux être souple avec les horaires et les conjoint(e)s
que j’encadre le sont généralement aussi. On trouve toujours une solution.
Propos recueillis par Nathalie Wittig